De la frontière on tournait la terre vers l’arrière,
C’était le cas, au début.
Mais notre commandant la repoussa dans l’autre sens,
S’appuyant de sa jambe sur l’Oural.
Enfin on nous ordonna d’attaquer,
De reprendre chaque mètre, chaque miette.
Mais on se souvient, le soleil partit en arrière,
Et faillit aller se coucher à l’Est!
On ne mesure plus la Terre en pas,
En dérangeant les fleurs pour rien.
On la pousse des bottes avec force,
Loin de nous, loin de nous.
Sous le vent de l’est se plièrent les meules,
Pressant le troupeau aux falaises.
On dévia l’axe de la terre, sans levier,
En changeant la direction de l’assaut.
N’ayez peur si le soleil n’est plus à sa place,
Le jugement dernier c’est un conte pour adultes.
C’est juste qu’on tourne la terre comme on veut.
Car nos renforts sont enfin en marche!
Et on rampe, on embrasse les collines,
On agrippe les mottes avec rage.
Et des genoux on repousse la Terre,
Loin de nous, loin de nous.
Ici même en cherchant, personne n’aurait trouvé,
Des mains levées en l’air.
Les vivants, ici ont tous besoin des corps
En protections on transforme les morts.
Est ce que ce sale plomb nous trouvera tous d’un coup?
D’où viendra t’il, d’en face ou dans le dos?
Quelqu’un de son corps recouvrit la meurtrière,
Et la Terre, un instant, s’arrête!
J’ai laissé mes pieds, arrachés, en arrière,
Pleurant les morts, rampant parmi eux!
Le globe terrestre je le tourne de mes coudes,
Loin de moi, loin de moi.
Quelqu’un se leva et acceptant la mort,
Prit une balle, expira.
Mais vers l’ouest, vers l’ouest rampe le bataillon,
Pour que le soleil se relève à l’est!
On se traîne du ventre dans la puanteur des marais,
Mais on ferme les yeux sur l’odeur,
Là haut désormais tourne normalement le soleil,
Parce que l’on se rue vers l’Ouest!
Les mains, les pieds, détachés ou en place,
Comme du champagne on goûte la rosée.
On tire la terre en mordant les racines,
Vers nous, sous nous et loin de nous!
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