Je me suis retiré d’une affaire pas ordinaire Sans rien emporter, et nu comme un ver Sans rien qui me presse, mais l’heure était venue Et les monts bleus lâchent d’autres affaires. Nous apprenons beaucoup dans les livres, Mais les vérités volent au vent des paroles. "Nul n’est prophète en son pays!" Mais nos voisins les ignorent aussi.
               
Ils m’ont écartelé mais ceux que j’ai nommés Ont bien reçu de moi la part du lion, Mes talons dérapent sur le parquet glissant, Je grimpe l’escalier et me retrouve au grenier. Les prophètes disparus ne se retrouvent plus Zarathoustra et Mahomet sont à jamais partis Nul n’est prophète en son pays Mais les voisins les ignorent aussi. À l’office courent les caquets indifférents "Ça va mieux maintenant, il est parti à temps!" J’arrache aux portraits leurs toifes d’araignées Et je rejoins en courant les chevaux enfin sellés. Son visage est apparu et fce à lui jai bondi; Il m’a dit d’une voix nette et triste: "Nul n’est prophète en son pays!" Mais nos voisins les ignorent aussi. Je saute en selle mon corps devient cheval, Sous moi le cheval tombe, et je m’emballe, Je me suis retiré d’une affaire pas ordinaire Et les monts bleus lâchent d’autres affaires. Je bondis, sous le cheval crissent les épis, Et sous leur crissement s’élève un cri: "Nul n’est prophète en son pays!" Mais nos voisins les ignorent aussi.
© Jean-Jacques Marie. Traduction, 1989