Noyé sous la fumée, le miroir a perdu son reflet, Face à lui-même, chaque visage s’efface Les couples enfin sont las de valser, Et pourtant je chanterai jusqu’au dernier intant. J’ai déjà joué toutes les notes nécessaires, Le vin a flambé, le vin s’est éteint dans ma coupe, L’élan éphémère de mon discours est retombé, Et mon seul choix n’est-il pas de vider ma coupe muette? Pendant la moitié de l’année le soleil disparaît Et les âmes sont figées sous une écorce de glace C’est en vain que j’attends le brise-glace, Et ma mémoire est impuissante à combattre ce froid. J’ai déjà joué toutes les notes nécessaires, Le vin a flambé, le vin s’est éteint dans ma coupe, l’élan éphémère de mon discours est retombé, Et mon seul choix n’est-il pas de vider ma coupe muette? L’orchestre joue un air las et embrouillé, Le cercle sur moi se referme et m’enserre. Je dois partir tranquille et souriant Et pourtant je chanterai jusqu’au dernier instant. J’ai déjà joué toutes les notes nécessaires, Le vin a flambé, le vin s’est éteint dans ma coupe Sous le rictus indifférent des miroirs blafards Mon seul choix n’est-il pas de vider ma coupe muette?
© Jean-Jacques Marie. Traduction, 1988