A bout de souffle, à bout de sang, je m’arrache À cette chasse toujours recommencée. Et la traque sans cesse reprend, la traque Éternelle des tueurs riant à leurs affûts. La mitraille claque dans les branches, Les chasseurs se terrent dans l’ombre, Et cloués en cibles de chair Les loups se renversent par la neige. Valse la chasse aux loups, la chasse Aux carnassiers gris, aux mâles, aux louveteaux, Aboient les rabatteurs et les chiens de la nausée Sur la neige sanglante aux rouges étendards. Les traqueurs en joie jouent avec les loups, et jamais leur main ne tremble. Leurs étendards nous barrent le chemin. Tous les coups portent et chaque balle tue. Un loup ne peut bafouer les traditions, Nouveau-nés aux yeux mi-clos nous tétions Le lait de la louve et sa règle stricte: «Interdit de passer la ligne des étendards!» Valse la chasse aux loups, la chasse Aux carnassiers gris, aux mâles, aux louveteaux, Aboient les rabatteurs et les chiens de la nausée Sur la neige sanglante aux rouges étendards. Nos pattes et nos crocs foudroient. Alors, réponds, toi qui guides notre meute: Pourquoi courons-nous droit sur leurs balles Sans jamais transgresser l’interdit? Le loup se soumet toujours à la loi... Elle est venue l’heure de ma fin, Et le chasseur chargé de mon destin Lève son arme dans un long sourire. Valse la chasse aux loups, la chasse Aux carnassiers gris, aux mâles, aux louveteaux, Aboient les rabatteurs et les chiens de la nausée Sur la neige sanglante aux rouges étendards. La soif de la vie a rompu le joug, J’ai passé la ligne des drapeaux, Et sur mon échine j’ai senti La stupeur des hommes et leurs cris. A bout de souffle, à bout de sang, je m’arrache Mais aujourd’hui ne recommence plus hier. La traque sans cesse, la traque reprend Des chasseurs gros-jean comme devant! Valse la chasse aux loups, la chasse Aux carnassiers gris, aux mâles, aux louveteaux, Aboient les rabatteurs et les chiens de la nausée Sur la neige sanglante aux rouges étendards.
© Jean-Jacques Marie. Traduction, 1989