Je n’aime pas l’issue fatale, Jamais l’existence ne me lasse, Et je n’aime pas ces instants-là, Ces instants où je souffre, où je bois... Je n’aime pas le cynisme froid, Je n’aime pas mieux la frénésie, Surtout lorsque par-dessus mon épaule Un étranger se penche sur mes lettres. Je n’aime pas ceux qui parlent à demi-mot, Ni ceux qui coupent la conversation, Ni ceux qui vous tirent dans le dos, Ou vous mitraillent à bout portant. Je n’aime pas la valse des ragots, Le vers du doute, l’aiguille des lauriers, Ni les maniaques du rebrousse-poil, Ni les casseurs qui brisent les carreaux. Je n’aime pas l’assurance rassasiée, Je préfère les freins qui cèdent, L’honneur passé de mode me navre, Et ceux qui bavent dans votre dos tourné. Je ne veux pas céder à la pitié Quand j’aperçois des ailes brisées, Je n’aime ni la violence ni l’impuissance Je ne pleure que sur le Christ en croix. Je ne m’aime pas quand la frousse me prend, Je ne supporte pas que l’on cogne un innocent, Je ne supporte pas que l’on entre dans mon âme, Je ne supporte pas qu’on la couvre de crachats. Je n’aime ni les manèges ni les arènes Où valsent le rouble et les millions; De grands changements peut-être nous attendent Mais ces jeux-là jamais je ne les aimerai.
© Jean-Jacques Marie. Traduction, 1989