Où est'ce que j’étais hier? Pas moyen de me rappeler. Je me rappelle qu’il y avait, sur les murs, du papier Je me souviens: il y avajt Klavka et sa copine, Même que je les mbrassais toutes deux dans la cuisine. Le matin, au réveil, ils m’ont fait la leçon. «Tu as injurié, qu’ils disaient, la maîtresse de maison. Tu effrayâis tout le monde, tu galopais à poil. Tu hurlais des chansons, et ton pere qu est general!» Après ça, paraît-il, j ai arraché ma chemise, Je me frappais la poitrine, disant qu’ils m’avaient tous trahi. Les invités ne pouvaient pas se relaxer, d’après ce qu’ils disent. J’embêtais tous les gens avec mes accords et puis, J’ai arrêté de boire, quand j’étais fatigué, pas mal. J’ai explosé par terre tous les verres de cristal, Versé le vin sur les murs et le service à café, Ouvrant grand la fenêtre, en bas, je l’ai jeté. Sans pouvoir dire un mot, ils restaient médusés. Peu à peu semble-t-il, ils ont pris de l’assurance. Ils me sont tombés dessus et puis m’ont ligoté Et à la fin du compte, ils sont entrés dans la danse. Lu’n me crachait danseur, l’autre me versait de la vodka. Un danseur me flanquait des coups à l’estomac. Quant à la jeunte veuve fidèle à son serment, Elle a eu pitié de moi, on vit une fois seulement. Tout pâle dans la cuisine et la figure en sang, Je donnais l’impression de vouloir faire marche arrière. «Délivrez-es moi! que je criais; Bon, ça suffit maintenant!» Ils ont défait les nœuds, mais caché les couverts. Ce que j’ai fait alors, impossible à decrier. D’où m’est venue tant de force, j e ne pourrais pas le dire. Comme le fauve blessé capable d’un exploit, J’ai cassé fenêtres et porte et le balcon me tombe des bras. Où est-ce que j’étais hier? Ma mémoire est obscure. Je me souviens qu’il y avait du papier sur les murs. Je suis resté tout seul, la tête comme un ballon. Où donc aller maintenant, avec ces traces de gnons? Hélas! Si j’en avais, ne serait-ce qu’un tiers encore Il ne reste plus qu’à se coucher et attendre la mort! Mais c’est bien que la veuve ait pu tout supporter Elle m’a plaint et, pour vivre avec elle, m’a emmené.
© Michel & Robert Bedin. Traduction, 2003